Archives pour: Mars 2009, 23

23.03.09

07:00:00, Cat�gories: Test / Critique  

par Nicore

Nekromantik

Cinéaste "underground" par excellence, le réalisateur allemand Jörg Buttgereit va choquer son monde avec ce Nekromantik (son premier long métrage) qui osera aborder frontalement un des derniers tabous modernes, la nécrophilie, qu'il traitera de manière plus que réaliste et sans fioriture en adoptant un style documentaire qui ne fera que renforcer le malaise.

NekromantikLe script va suivre le parcours de Robert, un jeune homme travaillant pour une société de ramassage de cadavres suite à des accidents, ce qui lui permet de se fournir, lui et sa compagne Bettie, en morceaux de corps humains qu'ils conservent dans des bocaux, puisqu'ils sont tous les deux fascinés par la mort. Un jour, Robert vole carrément un cadavre à son travail et le ramène chez lui, pour son plus grand plaisir et celui de Bettie, les poussant même à s'adonner à l'acte sexuel en compagnie du mort. Mais Robert se fait virer et Bettie disparaît, emmenant avec elle leur nouveau compagnon, plongeant ainsi Robert dans une dépression fatale.

NekromantikDans sa première séquence, le métrage va suivre un couple circulant de nuit en voiture après une pause pipi pour madame qui va avoir un accident suite à l'inattention du conducteur cherchant à se repérer sur une carte routière. Ce qui permettra ensuite à l'intrigue de nous présenter cette équipe de "nettoyeurs" venant embarquer les corps des deux accidentés, l'homme étant mort dans leur véhicule tandis que la jeune femme aura été éjectée en coupée en deux, comme le réalisateur nous le montrera clairement. C'est ainsi que nous allons faire la connaissance de Robert, un jeune homme faisant partie de l'équipe mais dénigré par le contremaître du groupe qui ira même se plaindre au patron de la boîte.

NekromantikL'intrigue va alors se focaliser sur ce jeune homme en apparence tout à fait normal, mis à part son travail quand même spécial puisqu'il sera même amener à effectuer une autopsie macabre suivie à grand renfort de détails sordides et étonnament crédibles, tandis qu'en parallèle nous verrons des images "snuff" d'un homme tuant un pauvre lapin pour finalement le dépecer et l'éventrer, laissant ainsi à penser que cet acte pourrait être à l'origine de l'attirance de Robert pour la mort et les corps mis à nus.

NekromantikCette entame du métrage sera largement efficace pour créer une ambiance malsaine, sordide et glauque grâce au souci de réalisme omniprésent chez Jörg Buttgereit qui va filmer ses séquences comme si elles étaient prises sur le vif, presque volées, avec une caméra tremblotante renforçant naturellement cet effet, tout en s'attardant sans complexe sur les détails macabres, comme lorsque la victime coupée en deux de l'accident de voiture sera mise dans un sac plastique pour être transportée.

NekromantikEt ce sentiment de malaise persistera lorsque le réalisateur va continuer à nous décrire le quotidien de ce Robert, collectionneur de morceaux de corps humains (yeux, organes internes et autres mains tranchées) qu'il vole sur son lieu de travail (travail bien pratique pour se fournir et épancher sa soif d'éléments macabres) et conserve dans des bocaux sous les regards complices de sa compagne Bettie qui semble elle aussi partager cette attirance pour le macabre, puisque de son côté elle semblera apprécier par exemple tout particulièrement se délasser dans sa baignoire remplie d'eau sanglante.

NekromantikAprès une pause plus souriante donnant un peu d'oxygène à ce climat étouffant et suivant un accident de tir obligeant le tireur à cacher sa victime, le métrage va véritablement rentrer dans le vif du sujet puisque après avoir charrié avec son équipe un cadavre en décomposition retrouvé dans un fossé, Robert va décider de le voler pour le ramener clandestinement chez lui, ce qui enthousiasmera plus que de raison une Bettie toute excitée et annoncera ce qui sera LA séquence tabou du métrage puisque le couple se décider de donner un pénis au cadavre et de se livrer à l'acter sexuel pour une partie à trois malsaine.

NekromantikEt en effet, cette séquence aura de quoi choquer et mettre le spectateur largement mal à l'aise, aussi bien par son traitement languissant et rallongé (histoire de nous livrer bien des détails répugnants sur les caresses données au cadavre et autres succions d'un œil gluant, sans oublier les multiples baisers donnés sur une chair pourrissante) que par le souci du réalisateur de rendre cette scène presque romantique, avec notamment une partition musicale doucereuse qui accompagnera cet ébat au piano, démontrant pleinement l'amour que Robert et Bettie vont porter à ce cadavre qui fera ensuite partie de leur vie en étant cloué au mur.

NekromantikMais le bonheur du couple sera de courte durée puisque peu de temps après Robert va se faire virer de son travail et Bettie, dépitée, va l'abandonner en prenant soin d'emmener le cadavre, lançant ainsi la seconde partie du film qui sera hélas moins convaincante pour suivre la dépression vécue par Robert qui va entre autres le pousser à s'adjoindre les services d'une prostituée à qui il va tenter de faire l'amour dans un cimetière, pour ne réussir à se satisfaire qu'une fois avoir tué la pauvre fille. Cette seconde partie sera aussi plus sanglante, avec un visage coupé en deux par une pelle de façon très graphique et surtout le suicide délirant de Robert qui va finir par s'éventrer lui-même, le poussant en même temps à l'orgasme.

NekromantikProvocateur, Jörg Buttgereit le sera continuellement pour avancer ses différentes situations toutes plus transgressives les unes que les autres visualisant de la sorte la déviance de ses personnages sans far et sans retenue (voir également le bain pris par Robert en compagnie d'un chat mort dont il va se frotter avec les entrailles sanglantes), tout en flirtant hélas quand même parfois avec le ridicule, notamment lors d'une séquence onirique qui en plus d'avancer le maquillage le plus faible du métrage, prêtera largement à sourire, de manière évidemment involontaire, avec cette partie de passes de ballon où une tête décomposée remplacera la balle, avant que ce soit carrément des entrailles qui amuseront Robert.

NekromantikDe même, le réalisateur s'écartera du standard des films horrifiques par le traitement apporté continuellement au métrage qui tendra vers le reportage aussi bien par une mise en scène naturaliste et utilisant des effets de style uniquement pour accroître le sentiment romantique parcourant certaines séquences, que par cette image malpropre et granuleuse donnant à l'ensemble un réalisme absolu, alors que les événements décrits le seront de manière brute et sans souci réel de linéarité narrative ou de transition pour se contenter de suivre des protagonistes qui évolueront uniquement dans leur déviance, l'auteur ne présentant aucun autre aspect de leur vie.

NekromantikDans ce contexte, les personnages auront bien entendu une importance capitale et une interprétation elle aussi naturelle et sans tabou (la nudité s'affichant sans fausse pudeur mais sans jamais donner l'impression d'être gratuite ou enjolivée) viendra renforcer la crédibilité de l'ensemble, tandis que les effets spéciaux seront souvent probants malgré un amateurisme parfois visible dans les maquillages, aussi bien pour présenter ce cadavre gluant et pourrissant que pour les quelques effets gore d'un film qui malgré sa réputation ne le sera pas tant que cela.

Donc, ce premier Nekromantik (dont la fin ouverte annoncera clairement la suite mis en branle quatre ans plus tard par le réalisateur) sera vraiment un film à part, jusqu'auboutiste dans sa relation avec la mort et brisant sans sourciller les tabous pour réussir à devenir aussi choquant que provocateur, et ce en réussissant l'exploit de ne jamais forcer le ton ou de paraître surfait ou gratuit !

NekromantikLe DVD de zone 2 allemand édité par le réalisateur lui-même avancera une image volontairement granuleuse et truffée de petits défauts, tandis que la bande-son sera efficace, avec une partition musicale étrange, parfois stridente, ailleurs mélancolique ou romantique, alors que le métrage est ici proposé dans sa version originale allemande, avec des sous-titres optionnels en français.
Au niveau des bonus, on pourra suivre un petit making-of d'époque avançant les dessous des effets spéciaux, un reportage sur la "première" du film, une interview du réalisateur (non sous-titrée..), une conséquente galerie de photos du film et de son tournage, un court-métrage du réalisateur terriblement amateur mais du coup souriant ainsi que la bande-annonce du film et des autres films du réalisateur.

Pour ceux qui voudraient découvrir ce film macabre et transgressif, le DVD de zone 2 allemand étant épuisé un peu partout, il faudra guetter les annonces sur les différents sites d'occasion où il est parfois furtivement disponible, comme ici !

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