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01.01.09

15:00:00, Cat�gories: Test / Critique  

Titre du film : Australia
Réalisateur : Baz Lurhmann
Avec : Nicole Kidman, Hugh Jackman, ...
Durée du film : 2h35
Date de sortie en salles : 24 décembre 2008

Par Emmanuel Pujol

7 ans, c’est long, très long même… C’est le temps qu’il aura pourtant fallu à Baz Luhrmann, le baroque et exubérant réalisateur australien, pour nous transporter du Moulin Rouge décadent et bohème de la fin du 19eme siècle au bush australien à la veille de la seconde guerre mondiale.

Le film, lui, ne perd pas une seconde pour nous plonger immédiatement dans une atmosphère digne des grands films de l’âge d’or hollywoodien et annoncer sans ambiguïté l’ambition démesurée de Baz : offrir un spectacle généreux, une romance « bigger than life », un mélodrame pleinement assumé pendant près de 3h. L’ouverture avec carte du monde cartoonée, présentation des enjeux en voix off par un jeune aborigène et rythme effréné digne des meilleurs Howard Hawks met l’eau à la bouche.

Et, dans sa première partie, Australia répond globalement aux attentes : paysages superbes et mis en avant avec un souci maniaque du détail qui confine à la déclaration d’amour pour les terres sauvages australes ; héros stéréotypés mais sympathiques - un « lonesome » cow-boy, une aristocrate coincée, un enfant aborigène tous regroupés à Faraway Downs, sorte d’auberge espagnole d’éclopés et de sans grades perdus au milieu de nulle part ; quête initiatique sous forme de défi impossible - convoyer un troupeau sur des kilomètres et des kilomètres de régions désertiques. Le rythme est enlevé, les bons mots fusent, l’émotion et l’action sont habilement mêlées, rien ne manque. Même pas les plans caricaturaux et excessifs tel ce ralenti interminable sur le torse nu, musclé et mouillé d’Hugh Jackman, réduit à cet instant précis à un simple et pur corps…

Mais une fois l’expédition arrivée saine et sauve après moult péripéties (oups pardon, vous ne vous en doutiez pas !) à bon port, le scénario commence sérieusement à patiner et il reste encore plus d’une heure. Le tournant du film est facile à retenir, c’est un non évènement en soi : Hugh Jackman s’est rasé. A partir de là, le scénario sombre dans un pathos mielleux, renforcé par des violons omniprésents. C’est bien simple, Darwin (la ville, pas le scientifique !) bombardé par les Japonais, on se croirait presque dans Pearl Harbour - et ce n’est pas un compliment. Pire, le dernier quart d’heure est interminable tant le film accumule les fausses fins et hésite entre happy end et drame. Sans dévoiler l’issue finale, on est quand même sidéré de voir un réalisateur qui a su à ce point maîtriser son image et son récit jusque là s’embourber dans un tel sentimentalisme gluant. Faute avoué à demi pardonnée, Baz Luhrmann a confessé avoir écrit 6 fins différentes et en avoir tourné au moins deux, voire trois. C’est vrai, autant rester mystérieux, la réponse sera –évidemment- dans le DVD version collector, il faut bien vendre et vivre (ou si vous préférez, business is business même au pays des kangourous).

Pour accentuer la filiation d’Australia avec les grands classiques américains, Baz Luhrmann a choisi comme mélodie récurrente du film le fameux « Over the Rainbow », thème du Magicien d’Oz de Victor Fleming (également réalisateur du mélodrame définitif, Autant en emporte le vent auquel Australia fait aussi référence). Au début, c’est sympa, ça rappelle de bons souvenirs. Au bout de dix fois, on en peut plus surtout que l’air est souvent massacré, chanté faux ou joué à la hache… pardon à l’harmonica.

Comment ne pas non plus être agacé par le traitement simpliste de la question dramatique et épineuse de la Génération volée, ces métisses enlevés à leur famille et placés en orphelinats ou dans des missions catholiques afin de protéger la « pureté » de la race australienne. Même si le film a le mérite de rappeler ce pan peu glorieux de l’histoire australienne, il le fait avec un ethnocentrisme condescendant au final assez pesant et ressemblant au traitement du « bon sauvage » chez Voltaire. Et pourtant Brandon Walters est terriblement attachant dans la peau de l’enfant aborigène pour son premier rôle au cinéma. Le rôle de son grand père est lui plus anecdotique et surtout sa présence « magique » est par trop répétitive. Le thème de la culture aborigène avec ses traditions et ses rites mystiques avait été abordé de manière autrement marquante et remarquable en 1981 dans La dernière vague de Peter Weir.

Dernier point négatif du film, la performance outrancière d’une Nicole Kidman méconnaissable passant du rire aux larmes dans une hystérie non contagieuse. Décidément, le Botox fait des ravages à Hollywood. Après avoir défiguré Meg Ryan, la chirurgie esthétique fige la glaciale Nicole tout en lui gonflant les lèvres. Le résultat est effrayant en gros plans, âmes sensibles s’abstenir. Cela ne facilite d’ailleurs pas la crédibilité de la romance entre les deux héros déjà fortement entamée par le peu d’ardeur déployée lors des rares scènes de baisers (du bout des lèvres) et de sexe (chaste, chaste, chaste…)

Au final, que retenir de ce film fleuve s’inscrivant dans une tradition perdue du mélo sans complexe ? Probablement que si la dernière heure avait été à la hauteur de la première partie épique, nous aurions tenu là le film de cette fin d’année. En lieu de quoi, nous avons certes un spectacle idéal pour tenir tranquille les bambins et les grands parents avant le réveillon de Noël (le film sort justement le 24 décembre) mais qui souffre de l’ambition démesurée de son réalisateur. Morale de cette histoire : à vouloir en faire toujours plus, on finit par en faire simplement trop. Même si le grandiose (clinquant) est incontestablement au rendez-vous, même si les décors sont somptueux, même si Luhrmann est un fabuleux faiseur, attention tout de même à l’indigestion de pathos et de bons sentiments…

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