30.04.10

15:07:55, Cat�gories: Dossier  

Compte rendu de la troisième édition de L'Etrange festival de Lyon, par Nicofeel :

S'étant déroulée du 31 mars au 6 avril 2010, la troisième édition du festival de Lyon a réuni un public de personnes curieuses manifestement plus important que les années précédentes.
Je n'ai pu être présent que lors du week-end des 3 et 4 avril 2010 mais cela m'a tout de même donné l'opportunité de voir plusieurs films rares, atypiques voire carrément déjantés. Bref des films qui rentrent parfaitement dans la thématique de L'étrange festival.
Je vous invite donc à lire ci-dessous mes avis à chaud sur les 5 films visionnés pendant le week-end.

1°) Villemolle 81 de Winschluss :

Pour commencer le week-end lyonnais et nous mettre directement dans l'ambiance du festival, les organisateurs ont eu la bonne idée de commencer par le déjanté Villemolle 81.
Le visionnage du film Villemolle 81 a été précédé par les bandes annonces des films Blackaria et Viva la muerte.
La direction de l'Etrange festival a eu la bonne idée (que l'on retrouve lors de chacune des séances) d'inclure un court métrage. Dans le cas présent, il s'agit de la soubrette à la tronçonneuse, un court animé avec des pâtes à modeler. Comédie et gore sont au rendez-vous de cette animation bien frapadingue signée par un japonais.

Mais revenons à Villemolle 81. Réalisé par Vincent Paronnaud (alias Winshluss), connu pour être le co-scénariste de Persépolis, Villemolle 81 est une comédie complètement délirante. Villemolle 81 se situe parfaitement dans l'esprit des Inconnus et de Groland.
Complètement déjanté, le film nous offre toute une clique de personnages du « terroir » plus atypiques les uns que les autres : il y a la secrétaire nymphomane, le maire persuadé qu'il va faire de son village une métropole (une plage antillaise sous l'effet de la remontée des eaux ! ; ou encore l'espoir d'un spectacle médiéval renommé), le super nounours joué par l'écologiste de service, Zoltar le chef d'une secte , Sébastien le garçon de ferme simplet.
Tout prête à rire dans ce film qui mélange fausse publicité (la présentation complètement ringarde de Villemolle), faux documentaire (le journaliste de de l'émission Charmants villages de France venu tourner un documentaire sur Villemolle) et qui n'hésite pas à utiliser des images complètement différentes : ainsi, on a droit tantôt à des images comprenant beaucoup de grain, des images saturées ou encore des séquences d'animation. Le tout donne lieu à un joyeux bordel à l'humour communicatif.
Les dialogues sont vraiment décapants et les situations complètement stupides. Malgré des effets spéciaux qui jouent ouvertement la carte de ringardise (on se croirait dans un film d'Ed Wood au niveau des effets spéciaux) et des acteurs qui sont réellement en roue libre, on prend un plaisir évident à regarder ce film.
D'autant que Villemolle 81 vire progressivement vers le film de zombie. Evidemment, pas le film de zombie à la Romero mais plutôt du zombie rigolard à la Peter Jackson.
En somme, voilà une première surprise agréable qui nous a fait débuter dans la joie et la bonne humeur ce week-end lyonnais.

2°) Marvel 14 : superhéros contre censure de Philippe Roure et Jean Depelley :

Le visionnage du film Marvel 14 a été précédé par les bandes annonces de Morgane et ses nymphes et de The broken imago, le prochain film de Douglas Buck produit par Metaluna (la société de Jean-Pierre Putters, le créateur du magazine Mad Movies).
La direction de l'Etrange festival a eu la bonne idée (que l'on retrouve lors de chacune des séances) d'inclure un court métrage. Dans le cas présent, il s'agit de Dolorosa, un court métrage de Christophe Debacq. Très bien filmé, le film est émaillé de nombreuses séquences-chocs où l'on retrouve une jeune femme enceinte. La violence allant en crescendo et la conclusion du court m'ont laissé quelque peu dubitatifs. Faisant clairement penser à Martyrs, je me demande quelles sont les intentions du cinéaste : choquer le spectateur ? Dénoncer la violence par la violence ? Voilà un court pour le moins sujet à controverse, surtout vu le lieu où il a été filmé.

Produit par Metaluna , Marvel 14 est un documentaire qui s'intéresse aux super-héros et à la censure. Les 2 réalisateurs, Philippe Roure et Jean Depelley signalent que l'étalonnage technique s'est achevé il y a seulement 2 jours. Quelques éléments imparfaits, notamment au niveau du son, sont donc à prévoir. Pourtant, la vision de ce film documentaire s'est déroulée sans accrocs particuliers.
Ce film documentaire s'intéresse au fameux numéro 14 de Marvel qui n'est jamais sortie officiellement mais que certaines personnes pourraient détenir. Au-delà du mystère suscitée par ce numéro auprès des nombreux fans de comics, le documentaire est surtout intéressant par sa capacité à évoquer la censure dans l'après-guerre. En effet, on apprend que la loi du 16 juillet 1949 crée une commission de censure contre la jeunesse. Celle-ci se justifierait par le fait que les mauvaises lectures des jeunes expliqueraient le taux de criminalité.
Les BD de comics vont faire l'objet de sévères censures. Quand la revue n'est carrément pas interdite de vente aux adolescents (le public cible de ce type de publications), elle fait en tout cas l'objet de nombreux aménagements pour permettre sa diffusion. Les éditions LUG, qui diffusent la bande dessinée Marvel, doivent remplacer de nombreuses onomatopées par rapport à l'oeuvre américaine originale. De nombreuses images qui véhiculeraient la violence et des mots grossiers sont aussi supprimés. L'oeuvre originale n'est pas respectée et le public français lit donc une version édulcorée des Marvel.
Sous des faux prétextes (la violence véhiculée par la BD), la France s'est donc lancée dans la censure afin de limiter en fait l'emprise des Etats-Unis, notamment une idéologie capitaliste et consumériste.
Le documentaire se révèle donc tout à fait instructif, même si le montage du film (voir les images de début et de fin) est tout de même quelque peu orienté vis-à-vis du public.

3°) Viva la muerte de Fernando Arrabal :

Note liminaire : Fernando Arrabal aurait dû être présent afin d'évoquer son film mais il a « planté » la direction de l'Etrange festival. C'est une réelle déception car son film est plus que jamais sujet à débat.
Le visionnage du film Viva la muerte a été précédé par les bandes annonces de Eating Raoul et de Lust in the dust.
La direction de l'Etrange festival a eu la bonne idée (que l'on retrouve lors de chacune des séances) d'inclure un court métrage. Dans le cas présent, il s'agit de The funk (L'angoisse), un court métrage australien de 7 minutes où un homme perd la mémoire et finit par se suicider. Ce court métrage de Cris Jones laisse quelque peu dubitatif quant à ses intentions.

Le film Viva la muerte est tiré du roman Baal Babylone de Fernando Arrabal. Les dessins de tortures que l'on voit notamment au début du film sont de Roland Topor.
Fernando Arrabal fait partie du mouvement Panique où l'on retrouve également Alejandro Jodorowsky et le dessinateur Roland Topor.
Dans ce film, qui est certainement l'un de ses plus radicaux, Fernando Arrabal dénonce sans ambages le franquisme, c'est-à-dire ce régime fondé par le général Francisco Franco de 1939 à 1977, qui est marqué notamment par un régime de parti unique, une liberté d'expression réduite et un catholicisme devenu religion d'Etat.
Ce régime est marqué par des arrestations et des exécutions sommaires. C'est ce qui nous permet de faire un lien direct avec ce film, Viva la muerte. Le film est vu à travers les yeux d'un enfant, dont le père, un communiste est recherché par le régime en place.
Cet enfant est sujet à de nombreuses hallucinations qui se caractérisent par de nombreuses images saturées dans le film (en rouge, en bleu), qui évoquent tantôt le personnage du père tantôt celui de la mère. Le côté oedipien de l'oeuvre est évident avec cet enfant très proche de sa mère qui l'observe non sans une certaine envie (cf l'image saturée en bleu où il la voit sous la douche ou encore quand il l'observe par le trou de la serrure).
En plus de cette histoire personnelle, Arrabal n'oublie à aucun moment de dénoncer le franquisme. C'est le cas lors des nombreuses séquences de tortures ou lorsqu'il évoque la religion. Il y a un côté clairement anti-clérical avec par exemple ce curé qui se retrouver à manger ses testicules. Ou encore dans une scène saturée où une religieuse est vue comme une truie.
Les images-chocs sont légion dans ce film. Parfois, c'est même à la limite du supportable. On peut même quelquefois se poser la question de la légitimité. Ainsi, dans les séquences où des animaux sont sacrifiés (comme dans les films de cannibales), quel est l'intérêt de tels procédés ? Ces actes paraissent tout de même quelque peu gratuits.
Au final, Viva la muerte est un film-choc, qui ne manque pas d'intérêt par les thématiques qu'il développe, mais tout cela est tout de même amoindri par une volonté de choquer le spectateur. Oeuvre radicale, elle peut tout autant fasciner que repousser le spectateur.

4°) Echo d'Anders Morgenthaler

Le visionnage du film Echo a été précédé par les bandes annonces des films La comtesse et Alice.
La direction de l'Etrange festival a eu la bonne idée (que l'on retrouve lors de chacune des séances) d'inclure un court métrage. Dans le cas présent, il s'agit de Nourriture spirituelle de Will Hartmann. Il s'agit d'un court de 8 minutes très drôle qui mélange comédie et horreur avec un professeur zombie qui invite ses élèves à manger des carottes et non des humains pour éviter d'accroître le nombre de zombies.

Echo date de 2007. C'est le deuxième film de son réalisateur. Très bien filmé et bénéficiant d'un scénario astucieux, Echo est une découverte très agréable.
La grande force du film est de ne pas hésiter à jouer avec différents genres. Au départ, le film évolue dans le cadre du drame voire du thriller avec cet enfant qui a été enlevé par son père policier, lequel a décidé de trouver refuge dans une maison isolée. Puis, et de manière relativement constante, le spectateur a l'impression qu'il se trouve dans un film de fantôme, à la manière de l'excellent Dark water d'Hideo Nakata. En effet, à plusieurs reprises, on sent dans la maison la présence d'une sorte de fantôme avec d'ailleurs ce filmage en caméra subjective. On a l'impression que les deux protagonistes principaux du film, ce père de famille et son fils, sont épiés par ce fantôme. A cette occasion, le film a d'ailleurs une capacité certaine à susciter la peur avec cette mise en scène qui joue sur les différents couloirs de la maison. Et puis la photographie froide du film, alliée aux décors quasi déserts de la maison, accroît ce sentiment de peur. Le moindre bruit peut être interprété comme l'arrivée du fantôme.
Progressivement, le spectateur comprend que la piste sur laquelle le cinéaste l'a invité à aller est finalement un leurre. Le film bascule dans la catégorie drame avec une explication très rationnelle des événements qui ont eu lieu. Le passé refait surface et on saisit alors les raisons qui amené le père de famille à aller en ces lieux et les raisons des différentes visions.
Réellement inquiétant, le film joue aussi la carte de la pédophilie sous-jacente avec des détails qui interloquent le spectateur, alors que celui-ci ne comprenne qu'il s'agit là encore d'une fausse piste.
Parfaitement joué, le film Echo vaut vraiment le coup. La réussite de cette oeuvre est totale et la fin donne un côté apaisé à ce film. A voir.

5°) Valérie ou la semaine des merveilles de Jaromil Jirès

Le visionnage du film Valérie ou la semaine des merveilles a été précédé par les bandes annonces des films Alice et Lust in the dust.
La direction de l'Etrange festival a eu la bonne idée (que l'on retrouve lors de chacune des séances) d'inclure un court métrage. Dans le cas présent, il s'agit du court métrage The cat with the hands. Ce court, basé sur un élément fantastique, se regarde très bien. Non dénué d'humour, il nous montre un chat qui a pris l'apparence de plusieurs personnes. On comprend à la fin que ce chat maléfique est tout bonnement le narrateur.

Valérie ou la semaine des merveilles est un film tchécoslovaque datant de 1971. Le film n'est visible que depuis 2-3 ans en DVD, et uniquement à l'étranger. Il n'a jamais été présenté en France. La copie a permis de voir le film a été empruntée à la Cinémathèque de République Tchèque. Le film comprend 3 passages noirs car on nous a signalé qu'il y a 3 bobines. Il s'agit d'un film de collection dont on ne peut pas couper les amorces. Aujourd'hui, on ne dispose plus de doubles postes comme l'époque. Il a donc fallu faire avec des pauses d'environ 20 secondes entre chaque bobine.

Comme pour l'exceptionnel Morse de Thomas Alfredsson, le réalisateur Jaromil Jirès n'est pas porté à la base par le fantastique. C'est certainement la raison pour laquelle il a apporté un ton original au film Valérie ou la semaine des merveilles. Ce film est tout bonnement une variation sur le célèbre Alice au pays des merveilles.
Le film bénéficie de trois éléments fondamentaux. D'abord, il y a la présence de la jeune Jaroslava Schallerova (alors âgée de seulement 14 ans) qui interprète le rôle de Valérie. Cette jeune actrice illumine de toutes parts l'écran par sa présence. L'actrice, avec son visage d'adolescente, et avec sa petite voix douce, donne réellement le sentiment de représenter l'être pur par excellence. C'est d'ailleurs sa pureté qui va être mise à mal par un démon, Constable qui lui en veut de manière constante. Il y a aussi dans cette histoire un prêtre libidineux ou encore une jeune fille qui va inviter Valérie à s'adonner au lesbianisme.
La deuxième qualité du film est la mise en scène du film. Sur le plan technique, le film est très bien réalisé et contribue sans nul doute à la réussite du film. Ainsi, la mise en scène est marquée par de nombreux plans en plongée où on retrouve par exemple l'héroïne endormie dans une pièce entièrement blanche. Le filmage adapté donne un côté quasi féérique ou inquiétant selon les cas de figure, à l'ensemble.
La troisième qualité du film, et non des moindres, est la photographie du film. Cette dernière est superbe et participe au côté fantastique du film. Dès le début du film, cette impression est présente. Ainsi, on voit des filles qui se baignent dans un ruisseau et Alice qui les regarde. On dirait que l'on a affaire à des nymphes. L'esthétique est vraiment superbe.
Si les qualités du film sont évidentes, malheureusement celui-ci souffre à mes yeux de quelques défauts. Il y a d'abord un aspect kitsch que l'on retrouve par exemple par la représentation assez ridicule du monstre principal, à savoir Constable, qui donne le sentiment d'être une sorte de vampire de pacotille. Il y a aussi l'arrivée du prêtre libidineux qui est assez ridicule.
Ce problème reste tout de même mineur. Le principal défaut est sans nul doute la différence entre le rêve et la réalité qui est parfois bien difficile à faire. On ne sait pas toujours si on se trouve en plein rêve (ou cauchemar) ou non. Le film manque d'une certaine clarté sur ce point. Ce qui est dommage car le film est réussi sur de nombreux plans.
Et puis il faut dire que voir ce film à 22 heures un dimanche, après avoir déjà regardé quatre autres films dans le week-end, n'aide pas forcément à la compréhension.

Dans tous les cas, ce week-end lyonnais s'est révélé très intéressant et a permis de découvrir des films rares pour certains, qui avaient surtout le mérite de sortir des sentiers battus.

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